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Mémoire-de-la-Littérature
27 janvier 2007

La Preuve par 9 (Annexe leçon VI)

…. Ou la terrible erreur d’Antoine Compagnon
Conte pervers.

La preuve par 9 est une méthode «antique et solennelle» permettant le contrôle (partiel !) du résultat d'une multiplication.
Supposons par exemple que nous fassions (à la main ou … « de tête » !) le produit : 263x478. On a trouvé 125714, et on veut savoir si le résultat est «juste» .
Pour cela, on trace une grande croix (type multiplication géante). Dans la case du haut, on écrit le reste par 9 de la somme des chiffres du premier nombre. Dans notre exemple, c’est 263, ce qui donne 2+6+3 soit 11, de reste 2 : …et on écrit donc 2. En bas, on écrit le reste par 9 de la somme des chiffres du deuxième nombre. Dans notre exemple, c’est 478, ce qui donne 4+7+8 soit 19, de reste 1 : …et on écrit donc 1. À droite, on écrit le produit de ces deux nombres, enfin, le reste par 9 de ce produit: ici cela fait 2. Et à gauche, on écrit le reste par 9 de la somme des chiffres du résultat trouvé, soit le reste par 9 de (1+2+5+7+1+4), c’est à dire de 20, qui fait 2. Pour que le résultat soit exact, il faut (et non pas, il suffit) que le nombre de droite soit égal au nombre de gauche. Ce qui est bien ici vérifié.
Alors, notre résultat est le bon ?
Pas certain ! La condition réalisée est nécessaire (un résultat exact l’exige), mais pas suffisante (elle peut advenir avec un résultat faux) . La « preuve » ne permet de se prononcer à coup sûr (et de crier à juste titre à l’erreur !) que si les deux nombres sont différents.

Jouons un peu : … Et Compagnon là dedans ? En s’exclamant, devant son indice retrouvé : «Voilà la preuve par 9 que je ne me trompais pas !», il commet l’erreur qui consiste à prendre la preuve par neuf pour une condition suffisante, alors qu’elle n’est que nécessaire !
Stricto sensu : s’il avait lu quelque chose, c’est bien qu’il y avait quelque part quelque chose. S’il avait lu quelque chose, il était donc normal et nécessaire de le trouver, de l’exhiber ! Mais le trouver, mais l’exhiber, ne prouvait en rien qu’il l’avait lu ! L’exhiber ne suffisait pas à prouver qu’il l’avait lu. Il pouvait juste en conclure … qu’il demeurait possible qu’il l’ait lu, la preuve par 9 n’ayant pas –seul cas où elle est sans appel – prouvé le contraire.

Rigueurs mathématiques inflexibles que pourtant, et avec quel talent, il pratiqua jadis : Polytechnicien de la promotion 1970, sorti brillamment dans le corps des Ponts et Chaussées. D’autant plus dure sera la chute ?

Mais voyons ça de plus près. Pour ne pas mourir idiots, par exemple….même si la preuve par 9, pont aux ânes de nos grands-pères, est une survivance de l’école en sabots et, désuète, n'est plus guère enseignée...

Le ressort en est la division euclidienne …………

Dans la division (euclidienne) de dividende A, de diviseur B, de quotient Q et de reste R, on aboutit à l’écriture : A=BxQ+R avec 0≤R<B.

On note que si dès le départ, A<B, le quotient Q est 0 et le reste R est A lui-même.

Si on divise un autre nombre A’ par le même diviseur B, on obtiendra : A’=BxQ’+R’ avec un nouveau quotient Q’ et un nouveau reste R’.

Examinons le produit AxA’, il va pouvoir s’écrire :
AxA’=(BxQ+R)x(BxQ’+R’)=BxBxQxQ’+BxQxR’+BxQ’xR+RxR’
ou encore (mise en facteur de B) : AxA’=Bx(BxQxQ’+QxR’+Q’xR)+ RxR’

Si on divise maintenant (et toujours par B) RxR’, il vient : RxR’=BxQ’’+R’’
et en reportant : AxA’=Bx(BxQxQ’+QxR’+Q’xR)+ BxQ’’+R’’

soit AxA’=Bx(BxQxQ’+QxR’+Q’xR+Q’’)+R’’
ce qui fait apparaître R’’ comme le reste de la division de AxA’ par B.

Bilan : Le reste dans une division du produit de deux nombres c’est le reste du produit des restes de ces deux nombres.

De même pour l’addition :

A=BxQ+R ; A’=BxQ’+R’ ; A+A’=B(Q+Q’)+R+R’
R+R’=BxQ’’+R’’ ; A+A’=Bx(Q+Q’+Q’’)+R’’

Bilan : Le reste dans une division de la somme de deux nombres est le reste de la somme de leurs restes.

Mais il y a plus, ici : … on divise par 9.

Une spécificité de la division par 9 est que son reste est égal au reste de la somme des chiffres du nombre qu’on a divisé.
En effet, 1, 10, 100, 1000, etc. ont pour reste 1.
Donc quel que soit le chiffre a (a=1,2,3,4,5,6,7,8,9), le reste de a, de ax10, de ax100, etc., c’est le reste du produit du reste de a par le reste de 1 ou 10 ou 100 etc., c’est à dire le reste du produit du reste de a par 1, c’est à dire le reste de a.
D’où le calcul du reste d’un nombre quelconque à 1,2,3,etc. chiffres:
Reste de a ? Reste de a
Reste de ab=ax10+b ? Reste de [reste de (ax10)+reste de b]
c’est à dire Reste de [reste de a +reste de b]
c’est à dire Reste de (a+b)
Reste de abc = ax100+bx10+c ?
Reste de [reste de (ax100)+reste de (bx10)+reste de c]
C’est à dire Reste de [reste de a+reste de b+reste de c]
C’est à dire Reste de (a+b+c)
Etc.
Le reste de la division d’un nombre P par 9 sera donc toujours le reste de la somme des chiffres de P.

Quelle exploitation possible si ce nombre P est un produit ?
Si : P=MxN
D’une part : Reste de P = Reste de ((Reste de M)x(Reste de N))
D’autre part :
Reste de P = Reste de la somme des chiffres de P
Reste de M = Reste de la somme des chiffres de M
Reste de N = Reste de la somme des chiffres de N

Du coup, si la multiplication effectuée est « juste » (exacte), les calculs respectifs du reste de P, résultat qu’on a obtenu et qu’on veut « contrôler », et du reste du produit des restes de M et de N, doivent donner le même nombre . Mais par la règle de la somme des chiffres, tous ces restes sont faciles à calculer dans une division par 9…

Reprenant ce qui a déjà été dit sur l’exemple de départ, mais cette fois en «comprenant» pourquoi :

On présente l’essai de vérification à l’aide d’une grande croix en X isolant quatre quarts de « camembert ». On écrit au nord le reste de M, au sud, le reste de N, à l’est, le reste du produit de ces restes et à l’ouest le reste de P . Nécessairement, on doit vérifier l’égalité des nombres écrits à l’est et à l’ouest.
En cas de désaccord (non égalité), la multiplication est nécessairement «fausse».

Mais attention, trouver l’égalité ne prouve pas qu’elle est « juste » .

Exemple : 237x758= ? J’ai trouvé 188646. Me suis-je trompé ?…..
M=237 me donne 2+3+7=12 de reste par 9 : 3
N=758 me donne 7+5+8=20 de reste par 9 : 2
Au nord, 3 ; au sud, 2 ; produit : 6 de reste 6, donc, à l’est, le reste par 9 de 6 : 6
Et à l’ouest ? 188646 me donne 1+8+8+6+4+6=33, de reste par 9 : 6
Hourrah ? Puisque 6=6 ?
Ben … non, car le résultat exact de la multiplication est : 179646.
Et alors ? Et alors j’ai trouvé (en me trompant) 188646 = 179646+9000
En prenant les restes par 9 : Reste de (188646)=Reste de (179646)+Reste de (9000)
Or, le reste de 9000 est égal à 0. Le bon et le mauvais résultat ont le même reste ! Il y en a vraiment qui n’ont pas de pot !

En fait, la « preuve par 9 » est prise en défaut si le résultat faux fourni et le résultat exact diffèrent d’un nombre de reste par 9 égal à 0, c’est à dire d’un multiple de 9.
Une telle configuration d’erreur est possible, mais peu fréquente. C’est pourquoi, la preuve par 9, contrôlée expérimentalement (par la pratique de générations d’instituteurs) comme «très souvent», voire sur une carrière un peu chanceuse «presque toujours» suffisante, a eu le succès d’une condition fournissant «le bon diagnostic».
Il n’en demeure pas moins qu’elle n’est pas fiable à 100%.
Il y a toujours des gens qui montent dans le mauvais avion……

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