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Mémoire-de-la-Littérature
11 février 2013

Les truchements proustiens de Daniel Rondeau

Séminaire du 5/2/2013

Daniel Rondeau

Daniel Rondeau est né en mai 1948 au Mesnil-sur-Oger en Champagne. Une existence diversifiée et éclectique dont on trouve sur Wikipedia les multiples étapes. Romancier, éditeur, journaliste et diplomate, il a d’abord été un jeune homme engagé passé du statut d’étudiant en droit à celui de militant d’extrême-gauche, membre de la Gauche prolétarienne et, logiquement, ouvrier pour quelques années en usine et en Lorraine.

La distance qu’il met entre lui et lui dans le rappel liminaire qu’il fait, après l’introduction d’Antoine Compagnon, de ces circonstances est pour des gens comme moi qui ont connu à peu près au même âge la même période – il n’est mon cadet que de quatre ans – l’occasion d’une poussée d’urticaire, tant il est difficile, quand on n’a jamais cédé aux illusions des extrémismes (quand on n'a jamais été jeune?), d’être le témoin de crypto-repentances embourgeoisées et cossues en totale rupture factuelle avec les discours vengeurs et parfois haineux qui furent tenus, ou au moins approuvés. J’aurais préféré Rondeau proustien et métallo à la retraite. Allons, je m’emporte sottement et … il n’aurait alors pas été invité.

La séance est en fait, sur cinquante minutes, le déroulé d’un parcours que les engagements à l’extrême gauche ont commencé par écarter de la lecture, malgré des débuts que son instituteur de père – un saint laïque, dit-il – avait en dépit de ses modestes moyens généreusement encouragés par l’ouverture, lors de son passage en 6ième, d’un compte dans une librairie afin qu’il pût, ad libitum, entrer plus directement dans la fréquentation des livres.

Il cite Sodome et Gomorrhe : « … je n'avais jamais fait de différence entre les ouvriers, les bourgeois et les grands seigneurs, et j'aurais pris indifféremment les uns et les autres pour amis. Avec une certaine préférence pour les ouvriers, et après cela pour les grands seigneurs, non par goût, mais sachant qu'on peut exiger d'eux plus de politesse envers les ouvriers qu'on ne l'obtient de la part des bourgeois, soit que les grands seigneurs ne dédaignent pas les ouvriers comme font les bourgeois, ou bien parce qu'ils sont volontiers polis envers n'importe qui, comme les jolies femmes heureuses de donner un sourire qu'elles savent accueilli avec tant de joie. » Simple clin d’œil, comme pour suggérer que s’il ignorait Proust, à l’usine, Proust, au fond, ne l’ignorait pas.

Malraux   Malraux ...  Barrès Barrès 

Quoi qu’il en soit, il avait des a priori anti-proustiens, un jugement hâtif attribué à Malraux par exemple : « Proust, un écrivain pour concierge » … Il est avéré que Malraux n’aimait pas le narrateur de la Recherche – même s’il affirmait en 1971 à Jean-Yves Tadié qu’il le tenait pour l’un des grands romanciers du siècle -  mais je n’ai pas pu localiser la citation de Daniel Rondeau et je me demande s’il n’y a pas eu de sa part confusion avec le jugement que Walter Benjamin prête à Maurice Barrès : « Proust ? Un poète persan dans une loge de concierge

Peu importe, puisque l’usine comme le reste mène à tout à condition d’en sortir, la fin de la récréation sifflée, il était temps d’entrer dans ce qui allait devenir une carrière et de s’y soutenir de quelques écrivains à découvrir. C’est eux qui prendront Daniel Rondeau par la main et le conduiront à Proust… Ici ou là – j’écoute la version audio de la conférence, les impressions peuvent tromper – Daniel Rondeau s’offre un petit galop personnel de phrases écrites et un peu artificiellement léchées. Les lit-il ? Là, sa sortie d’usine et sa traversée de la Meurthe pour rejoindre le centre de Nancy et la librairie où il découvrira, premier pas proustien, premier médiateur, Paul Morand (il achète « Nœuds coulants » sous l’œil incrédule du libraire qui lui dit « ça n’intéresse plus personne »), est l’occasion d’un de ces curieux couplets.

Morand      Rondeau développe un peu sur Morand et Proust, sur leur première rencontre, pour une amitié compliquée qui durera jusqu’à la mort de Marcel. Il est moins précis que ce qu’en a écrit ailleurs Antoine Compagnon: « Les faits sont archiconnus. Paul Morand les a si souvent racontés. Je les rappelle vite pour mémoire. C’est Bertrand de Fénelon, diplomate comme Morand, de passage à Londres vers le front où il allait périr, qui lui parla de Proust à l’automne de 1914 et lui recommanda la lecture de Du côté de chez Swann. C’est ensuite Henri Bardac, blessé à la bataille de la Marne, attaché bénévole à l’ambassade de France à Londres, qui lui fit connaître Proust. Bardac l’avait entendu dire de Swann : « C’est rudement plus fort que Flaubert.» Âgé, Morand restera fier de ce mot qui lui servit d’introduction auprès de l’écrivain. Bardac le rapporta en effet à Proust, lequel réveilla un soir Morand, qui logeait chez Bardac à Paris, en sonnant à la porte à onze heures et demie. Trente ans plus tard, Morand, donnera un récit fabuleux de cette rencontre, dans Le Visiteur du soir. Seule la date en reste vague : « Je ne puis retrouver dans ma mémoire la date de cette première visite de Proust ; elle doit se situer à l’automne de 1915 ou au printemps de 1916. » Morand la placera plus tard en 1916, mais elle eut vraisemblablement lieu à la fin d’août ou au début de septembre 1915. »

Daniel Rondeau veut aussi citer un passage des Mémorables, de Maurice Martin du Gard (c’est le petit cousin de Roger Martin du Gard, prix Nobel 1937), mettant Proust en scène à une soirée chez la princesse Soutzo (qui sera l’épouse de Morand) : « C’est à onze heures du soir, ce qui fit qu’il avait l’air d’être en avance, que Marcel Proust entre chez la princesse Soutzo comme un phalène qui va buter contre une lampe. Proust lui parle de Morand : « Ce cher et délicieux ami que j’admire, d’une promptitude sans égale, d’une frivolité où la cruauté se baigne toute nue mais non tout entière, car elle y trempe seulement ses petits pieds glacés, d’une promptitude je vous disais sans égale, à rattraper ce temps-ci, mais non, il le précède, le devance, plus rapide qu’aucune machine volante, ce temps dont la vitesse, à entendre ce cher et délicieux Morand, sera aussi fabuleuse que l’est déjà sa nouveauté et constitue sa nouveauté elle-même et sert son principe et son exigence, ce temps qu’il me serait intolérable de vivre mais Dieu merci, je n’y vis pas. »

Daniel Rondeau évoque aussi l’Ode à Marcel Proust que Morand publie en 1919 dans Lampes à arc et qui fâche son destinataire, Proust y voyant une allusion blessante à ses mœurs (Proust à quels raouts allez-vous donc la nuit 
/ Pour en revenir avec des yeux si las et si lucides ? Etc.). Soulignant la fidélité de Morand à Proust, Daniel Rondeau cite Morand en 1928, lors de la parution des derniers volumes de la Recherche, soucieux d’expliquer aux américains, ce peuple de sprinters qui ne se retourne jamais (l’expression est de Jean-François Fogel dans son Morand Express de 1980), la magie subtile et lente des détours de Proust : « Le temps dans sa conception populaire, ce temps implacable, mesurable  comme l’est l’espace, est nu et abstrait comme lui, ce temps dans lequel nous sommes accoutumés à établir la chronologie de nos souvenirs artificiels et sans vie ; le temps n’est rien de plus qu’un vide sans signification que Proust traverse d’un bond, pour prendre contact avec le vrai temps, la véritable durée, et la vérité spirituelle dont il relate à travers dix volumes les merveilles et les imperfections. »

Proust, dit Daniel Rondeau, est une figure essentielle et constante chez Morand et, dans le « Journal inutile » (fin des années 1970) de celui-ci, il est plus présent que les contemporains nommés, d’Ormesson, Giscard d’Estaing, Maurice Rheims, Cocteau, de Gaulle… Citations : « - 8/9/1968 : ‘‘Le sentiment de l’amour n’a rien de commun avec l’objet qu’on aime’’ ; c’est une phrase de Benjamin Constant, elle sera la source de toute la littérature moderne depuis Proust. – 17/6/1969 : Inutile d’écrire des romans si l’on n’entre pas dans ses personnages, soit par médiumnité, comme Balzac, soit par bonté d’âme, comme Flaubert, soit par intelligence, comme Proust. – 7/7/1969 : Je donnerai au musée Proust d’Illiers les six volumes de l’Histoire de l’Affaire Dreyfus, de Reinach, dont Proust m’avait fait cadeau ‘‘pour m’apprendre à ne pas être antisémite’’, disait-il. »

Autre médiateur, Maurice Barrès. Daniel Rondeau là, va vite, évoquant surtout le livre d’entretiens de Frédéric Grover avec André Malraux (« Six entretiens avec André Malraux sur les écrivains de son temps . 1959-1975 »), où l’interviewé développe une comparaison entre Barrès et Proust.

Troisième médiateur proustien, découvert à la fin des années 1970, Daniel Halévy, camarade de Proust sur les bancs du lycée Condorcet (et sous la férule fort malhabile – si l’on en croit l’inspection générale de l’époque – de Stéphane Mallarmé), encore là au début des années 1960.

Daniel Halévy3Daniel Halévy2Daniel Halévy 

Halévy évoque Proust dans  « Pays parisien » : « Il figurait parmi nous une sorte d’archange inquiet et inquiétant. Nous l’aimions bien, nous l’admirions, pourtant nous restions étonnés, gênés par l’intuition d’une différence, d’une distance d’un incommensurable et visible réel entre nous. Nous voici dans la cour du lycée, trois ou quatre vigoureux garçons, Jacques Bizet, Fernand Gregh, Robert de Flers … et nous devinions soudain une présence, nous sentions un souffle près de nous, quelque frôlement de notre épaule ; c’était Marcel Proust, venu sans bruit, comme un esprit, c’était lui, ses grands yeux d’orientale, son grand col blanc, sa cravate flottante. »

Pourquoi Daniel Rondeau s’est-il intéressé à Daniel Halévy ? Il l’a succinctement évoqué et – compte tenu de son propre parcours – on le comprend bien (micro-recherche complémentaire et personnelle sur le net) à travers le livre qu’a consacré à Halévy en 2001 l’historien universitaire Sébastien Laurent. Fils d’un académicien (Ludovic Halévy) et frère d’un philosophe (Élie Halévy), Daniel Halévy appartient au milieu de la haute bourgeoisie parisienne et à une famille orléaniste par toutes ses fibres. Mais dans les années 1890 c’est la découverte du socialisme, celui de Proudhon. Le jeune bourgeois (il est né comme Proust en 1871) éprouve le besoin de s’aérer. Attiré par les luttes d’un monde ouvrier qui s’organise et faisant fi des barrières sociales pourtant alors très rigides, il s’efforce d’explorer un univers qui lui est étranger, notamment dans les comités d’ouvriers de Seine-et-Oise. Il se passionne pour les Universités populaires. Et cette volonté de connaître d’autres mœurs que celles des salons parisiens, qui  l’amène aussi à aller vers le milieu paysan au cours de nombreuses rencontres signe un mouvement généreux dans lequel il est certain que l’ex-Daniel-Rondeau-de-la-Gauche-prolétarienne a dû reconnaître assez de ses tâtonnements.

En attendant, raconte Daniel Rondeau, Halévy instruit son camarade de lycée des appas d’une crémière de Montmartre  et note l’affaire: « Fière et charmante beauté qui dépassait toute attente, entre le Moulin rouge, Le rameur et La truie qui file, Mme Chirade, c’était son nom, était une des gloires du Montmartre honnête ». Proust veut constater. Ils y vont. « Je n’avais pas exagéré, elle était magnifique. J’entends encore la voix de Marcel murmurant à mon oreille, ‘‘Qu’elle est belle !’’, et il ajouta, la littérature ne cessant de hanter nos esprits, ‘‘ Elle est belle comme Salammbô’’, puis, après un silence consacré sans doute à une courte et fervente admiration, ‘‘Crois-tu qu’on puisse coucher avec elle ?’’. Et Proust avait acheté des fleurs et était allé faire une proposition malhonnête à Mme Chirade qui avait décliné fermement, mais avec le sourire. Je pense qu’il est impossible d’avoir été chassé plus gracieusement qu’il ne l’avait été. »

Concernant ce témoignage d’Halévy, feuilletant pour le resituer la biographie de Jean-Yves Tadié consacrée à Proust, je suis tombé, coïncidence, sur la recopie, par ledit Halévy, dans son journal et à la date du 14 juin 1888, d’une lettre de Marcel à Jacques Bizet, où, dans le prolongement des soucis exprimés dans la lettre inattendue à Nathé Weil qu’Antoine Compagnon a, l’heure précédente, intégrée à son cours, il évoque son père lui demandant « de cesser au moins quatre jours de se masturber », ce qui provoque chez Halévy ce commentaire : « Pauvre Proust. Doué comme personne : le voilà qui se surmène. Faible, jeune, il coïte, il se masturbe, il pédéraste peut-être ! ». Aujourd’hui, décidément, nous ne sortirons pas du thème!

Pendant ce temps, Daniel Rondeau se raconte. Serge July le contacte en 1985 pour des responsabilités culturelles dans l’équipe rédactionnelle de Libération, il refuse, pour accepter un an plus tard, et nous glissons de là à sa rencontre, son admiration et son amitié pour Roger Stéphane.

Roger Stephane      Je connaissais vaguement celui-ci comme producteur de télévision. Sa notice sur Wikipedia élargit considérablement ce spectre. Après quelques propos digressifs, Daniel Rondeau peint en Roger Stéphane une nouvelle passerelle vers Proust, détaillant son travail télévisuel à travers un documentaire (Proust, l’art et la douleur) et dans une série d'interviews réalisées auprès des anciens amis de l'écrivain: Mauriac disant que jusqu’à Proust on refaisait du Balzac et qu’il a introduit la poésie dans le roman ; Cocteau qui tisse des liens entre Proust, Robbe-Grillet et Michel Butor et évoque Marcel allongé dans sa chambre « qui ressemblait au Nautilus » et vivant « dans un labyrinthe de politesse et d’impolitesse » ; Halévy qui hésite à répondre « tant Proust était singulier » ; Jacques de Lacretelle qui parle des filiations que Proust essayait d’établir à travers l’Histoire, avec au passage l’anecdote d’une réception chez le duc de Grammont présentant à Marcel son livre d’or avec cette supplique, « Pas de pensée, Monsieur Proust, seulement le nom » ; Emmanuel Berl qui s’est disputé avec Marcel, ce dernier lui lançant « Vous êtes bête comme Léon Blum » et en même temps ses pantoufles ; Paul Morand, le plus éblouissant de ceux qui se sont essayé, l’ayant côtoyé,  à imiter sa voix et ses intonations. Le morceau de bravoure prévu, dit Daniel Rondeau, c’était le témoignage de Céleste Albaret. Elle fut à la hauteur des attentes, malheureusement, toute cette déférence affectueuse et admirative, toute cette émotion accompagnant le rappel des derniers instants de « Monsieur », il croit se souvenir qu’elle les a itérés à l’identique, au mot près, à la mort de l’éminent professeur de médecine au service duquel elle est entrée après la mort de Proust.

Daniel Rondeau a encore deux hommages proustiens à nous proposer. Le premier concerne Bruno Bayon, tenue vestimentaire et code de civilité très stricts, coupe de cheveux, nous dit-il, à la Buddy Holly (1936-1959 ; figure importante de l’histoire du Rock’n Roll, qui a influencé aussi bien Dylan que les Beatles et les Stones ; mort dans un accident d’avion lors d’une tournée). Entré journaliste à Libération pour s’occuper du courrier des lecteurs, Bayon qui sauf erreur y travaille toujours, nous est présenté par Daniel Rondeau comme grand spécialiste de la sexualité de Proust  lors d’interminables débats de comptoir où il joue à déranger tout le monde par la précision physiologique de ses descriptions.

JulyBayonBuddy Holly 

July.......                      Bayon...........                  Buddy Holly ...

Le second de ces deux derniers hommages proustiens concerne Heinrich Maria Ledig-Rowohlt, « inventeur » du livre de poche allemand, patron spirituel de l’édition mondiale … . Daniel Rondeau « se lâche ». Il est à Saint-Moritz, Hôtel Schweizerhof (si ça vous tente pour la dernière semaine de février, ce sera 3627,41€ en chambre double supérieure avec vue sur le lac, petit déjeuner compris – il reste encore deux possibilités). Un personnage à la voix de stentor m'ouvre les bras dès la porte franchie … Suit un passage très écrit qu’aucun cliché ne décourage et qu’à l’oreille on pense lu, avec coquetteries irritantes et conversation autour d’un café, une conversation bien sûr copieusement soutenue  « malgré l’heure matinale » par force verres de Bloody Mary. Faut-il faire un rappel? Inventé dans les années 1920 au Harry’s Bar ou au bar de Ritz, selon les versions, ce cocktail Vodka-Jus de tomate- Epices s’immortalise des faveurs d’Ernest Hemingway et fait partie des snobismes alcoolisés du milieu littéraire. Narration mythifiée de la rencontre, élargie à quelques éléments de la biographie de Rowohlt, qui présente Jane, sa compagne à Rondeau. Jane, anglaise d’une élégance forcément sublime, l’un des personnages d’Ada ou l’ardeur, de Nabokov, Jane qui a appris le français dans la Recherche … et qui rencontre Rowohlt en 1956. Il a 48 ans, il a tout édité , il fait sa cour, il s’en vante. Et elle, distante, Tout ? Proust alors ? Hélas, faute d’argent, c’était tout … sauf Proust. La passion sautera l’obstacle. Daniel Rondeau, passé Saint-Moritz, fréquente le couple ; Heinrich et Jane viennent à Paris, on se reçoit, on s’accompagne à des défilés de Haute couture et devant la munificence des robes, Jane, d’Odette de Crécy à Oriane de Guermantes, récite des pages entières de Proust.

                                    Rowohlt-Jane 

Difficile d’entendre de telles affabulations fantasmatiques. Nous voici témoins de l’élaboration d’une de ces constructions légendaires dont raffole la presse people. A distiller de telles sottises (Qui est capable de réciter de chic des pages entières de Proust ?), Daniel Rondeau frise plus le ridicule qu’il n’apporte d’informations.

Il revient à lui-même, pour finir, soulignant, pour reprendre le titre d’un de ses livres, que tout son effort littéraire s’inscrit dans la Marche du temps et citant Claudio Magris (écrivain, universitaire et journaliste italien ; son aîné d’une dizaine d’années) : « Ecrire, c’est aussi marcher le long du fleuve, remonter son cours, repêcher les existences naufragées, retrouver des épaves accrochées aux rives, et les embarquer sur une précaire arche de papier ».

La séance se clôt sur des remerciements de Daniel Rondeau à Antoine Compagnon pour son invitation et les efforts de mise au net  de son cheminement personnel vers Proust qu’elle a induits. Fermez le ban.

Bilan de tout ça ? Finalement mondain et très anecdotique. Intéressant aussi, aux irritations près, signalées. Mais sans aucune indication sur la relation intime de l’intervenant avec Proust, avec le texte de Proust. Connaître Untel qui aime Proust, est-ce entrer dans ce dialogue avec lui qui est une des magies du roman ? Où est Daniel Rondeau lecteur de la Recherche ? Rien d’ailleurs de ce qui a été dit n’indique même une lecture. Il ne s’agit pas de la mettre en doute, mais de souligner qu’elle ne transparaît pas.  On n’a parlé que des médiateurs, dans une conversation de salon où Daniel Rondeau, la bride sur le cou et handicapé par une toux récidivante (une affaire de climatisation, ai-je cru comprendre) aura survolé les aspects de sa vie traversés directement (connaissances, confrères) ou indirectement (écrivains) par des interlocuteurs férus de Proust (voire hostiles à : Malraux), mais de Marcel, mais d’une intimité directe avec la Recherche, de ce en quoi elle pourrait l’avoir changé, guère. Un documentaire aux contenus variés, point désagréable mais sans réelle implication.

 

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Commentaires
C
En évoquant "Pays parisiens" sur mon blog (http://diacritiques.blogspot.fr/2013/04/du-cote-de-chez-halevy.html) je suis tombé sur le vôtre. J'ai pris plaisir à lire ce compte-rendu de l'intervention de Rondeau (au Collège de France j'imagine), y compris l'humeur que vous y mettez, à bon escient. J'y ai trouvé aussi des références concernant ma lecture. Du coup, j'ai pris la liberté de mettre un lien vers votre intéressante chronique.<br /> <br /> Merci !
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N
lire " C'est ce témoignage que j'attends"
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N
Pour répondre à une de vos questions: oui, Rondeau se contentait de lire sauf quand il racontait "sa petite histoire personnelle". Je suis moins indulgente que vous, je pense qu'à part quelques potins, et encore, je me suis déplacée pour rien, n'ai rien appris, et surtout pas, ce qui seul m'intéresse à savoir:" qu'est ce qui fait qu'à la lecture attentive de Proust on est séduit, au sens premier, on suit aveuglément Proust et sa lecture nous marque à jamais, qu'est-ce qui fait que Proust sera toujours lu, et non dans ses brouillons mais dans son texte définitif; qu'est ce qui nous happe et nous en fait faire une lecture passionnée?" 'est ce témoignage que j'attends vainement depuis le début j'attends qu'on me parle de Proust avec ses tripes et non avec des anecdotes perso sans intérêt Car cela me fait mal ce qu'a supposé Nora, l'attrait pour 2 raisons essentielles: parce que Proust est juif et parce qu'il est homo!!! Qui avoue venir chez AC parce qu'il est beau, catho et homo???Pour moi cela n'a pas compté DU TOUT!!!
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