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Mémoire-de-la-Littérature
17 septembre 2012

Donc, Proust en 1913.

antoine-compagnon-cover   

http://www.college-de-france.fr/site/antoine-compagnon/course-2012-2013.htm

Bien, les perspectives se mettent en place.  Avec, d’évidence, cette question :

Pourquoi 1913 ?

Essayons quelques bribes de réponse.

Mais d’abord ceci : je n’ai découvert qu’en rouvrant le site du Collège de France en septembre (distraction antérieure ? apparition récente ?) l’existence de résumés « maison »  couvrant les cinq cours 2005-2012 et qu’on peut télécharger (pdf) : http://www.college-de-france.fr/site/antoine-compagnon/#|p=../antoine-compagnon/resumes.htm| .    A exploiter....

Je disais donc : Pourquoi 1913 ?

Le 23 décembre 1912, la NRF a fait connaître à son auteur son refus  de publication de ce qui est un premier état de la Recherche. Le 28 décembre, c’est Fasquelle qui refuse le manuscrit. ‘‘Tout est à recommencer’’ (G. Painter)

Le 11 mars 1913, Proust signe un contrat avec Bernard Grasset pour une publication à compte d’auteur.

Simultanément, de janvier 1913 à juin 1914, c’est pour Proust la marche au supplice de sa passion pour Alfred Agostinelli. C’est lui, ‘‘la prisonnière’’ qu’il retient, qui s’enfuira et qui mourra.

Proust a loué les services d’Agostinelli, comme chauffeur de taxi, en août 1907, lors d’un séjour à Cabourg. Il ne se ‘‘passera’’ rien hors la relation de service, mais Agostinelli n’a pas oublié la gentillesse du  ‘‘patron’’ et en janvier 1913, il se présente au 102 Boulevard Haussmann parce qu’il a perdu sa place, offrant ses services. Proust va l’engager comme secrétaire.

Le dialogue éditorial se poursuit avec Grasset, les épreuves à corriger sont livrées le 13 avril. Il apparaît que techniquement, la publication en un seul volume est exclue. Proust va repenser son roman en trois parties et c’est seulement Du côté de chez Swann qui  va aller jusqu’à son terme. Les jeunes filles en fleurs, la guerre aidant de son côté, seront différées de six ans.

Le contexte historique d’avant le premier conflit mondial est bousculé, avec les deux guerres des Balkans, depuis l’automne 1912.

Proust traîne tout ce printemps 1913 à Paris, malade et affectivement souffrant, déchiré par une relation amoureuse excessive et inattendue. Il se décide pour changer d’air à partir à Cabourg avec Agostinelli dans ses bagages, puis il en revient plus ou moins en catastrophe, avec le même. Soubresauts compliqués. Agostinelli est marié, aime sans doute les femmes  et adore Anna, son épouse, que Proust supporte mal et qui le lui rend bien.

1913 est par ailleurs l’année glorieuse de l’histoire aéronautique française. Agostinelli est passionné de mécanique. Il souhaite apprendre à voler. En octobre 1913, il affirme sa volonté. Hostilité de Proust. Conflit, crise, et Agostinelli s’enfuit début décembre dans le midi où il a de la famille.

Agostinelli       (ci-contre : Agostinelli)

Pendant ce temps, le 14 novembre 1913, Du côté de chez Swann est publié. La réception est favorable et tout s’enchaîne positivement, lectorat séduit, bons articles critiques, éditeurs qui viennent à résipiscence. Mais Proust traverse la période dans le désespoir amoureux.

Et puis, le 30 mai 1914, pour son deuxième vol en solo, Agostinelli excède les recommandations de son instructeur-chef et s’abîme en mer, non loin d’Antibes. 

G. Painter raconte : « … [Agostinelli]  se prépara à descendre mais il oublia qu’il lui fallait reprendre de la hauteur et de la vitesse avant d’aborder son virage : son monoplan vint s’écraser et se fracasser dans la mer, incliné sur l’aile droite, à quelques centaines de mètres de la côte. Du rivage, les spectateurs virent avec horreur le jeune homme debout sur le siège de l’épave en train de couler, gesticuler et appeler au secours. Agostinelli n’avait jamais appris à nager, et tandis qu’une barque à rames s’approchait, l’appareil s’engloutit en l’entraînant avec lui.’’

Oui : Pourquoi  1913?

Année charnière ? Prémices du premier conflit mondial, mois de tâtonnements et de rebuffades avant publication à compte d’auteur du premier tome de la Recherche, passion amoureuse après plusieurs années de calme affectif , bouleversement sentimental d’où naîtra Albertine prisonnière, un peu tout sans doute, qui permettra à Antoine Compagnon une mise en perspective historico-littéraire comme il les aime.

Mais, ayant pensé cela, je me suis aperçu que j’avais peut-être omis une motivation circonstancielle et fort simple : 1913-2013. Ce sera le cours du centenaire. Peut-être cela a-t-il tout simplement joué,  avec cette opportunité que  ce centenaire éventuellement choisi « à rebours » désignait une année proustienne essentielle. Alors, la poule ou l’œuf ?

Tadié  

Et en attendant le 8 janvier, que nous reste-t-il à faire ?

Relire la Recherche, bien sûr, et, trop longtemps laissé vierge sur les rayonnages, me décider à rentrer dans le Proust de Jean-Yves Tadié - la biographie.

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