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Mémoire-de-la-Littérature
27 février 2016

UN JOUR SANS FIN ….

Le juif errant

L'excès, décidément, nuit en tout, y compris lorsqu'il s'agit d'érudition. A.C. a atteint dans cette leçon du 16/02/16 des sommets en termes de références accumulées, engendrant à la fois un effet soporifique et, parce qu'elles recroisaient trop de choses déjà dites, une impression de jour sans fin. Je me sentais le Bill Murray hébété de cette performance.

La mise au point d'une recension sérieuse me semble hors de portée …

 A.C. évoque souvent les "physiologies", comme type littéraire. L'article de Wikipédia est informatif et intéressant  – On y retrouve nombre de ses références, dont ce qualificatif de "littérature panoramique" décerné par Walter Benjamin.  Amusant, aussi, CECI .

Evocation dès les premières minutes d'Asmodée, dans le roman Le diable boiteux (1707) de Lesage . Les curieux d'Asmodée sauront tout ici.

Il évoque aussi, dès les débuts du cours, la loi sur la Presse de 1835 et ses répercussions sur le développement de la caricature de genre. Petite mise en perspective ICI  .

Le chiffonnier et le Juif errant : renvoi à Nicolas Brazier, poète, chansonnier, vaudevilliste  qui, à propos de l'émeute des chiffonniers parisiens des premiers jours d'Avril 1832 (ils se soulèvent en raison de l'enlèvement des immondices ordonné par les autorités qui veulent assainir la ville ravagée par le choléra) parlera de Conspiration des tombereaux. Louis-Auguste Berthaud, ancien vitrier ambulant devenu poète et journaliste. Rédacteur du Charivari, républicain de gauche, dont A.C. met en exergue l'article de 1841, "Le décrotteur", dans Les Français peints par eux-mêmes , que l'on trouve ICI . Article amusant d'ailleurs, très détaillé, où l'on distingue le décrotteur de petite ville, celui de grande ville et enfin, le décrotteur parisien. Trois destins!

Le même Berthaud signe l'article d'ensemble, riche d'informations, sur Les chiffonniers de ce Les Français peints par eux-mêmes, article que l'on le trouve ICI , où il souligne ce trait que relève A.C. : " Les chiffonniers sont divisés en deux races, celles des Auverpins et celle des Parisiens. Les Auverpins viennent de l’Auvergne ; les Parisiens viennent de tous les pays. (…)".

Litanie de références :

Paris au XIX° siècle, une publication de 1841: en cherchant à la retrouver via le net - sans y parvenir - je tombe sur un intéressant article avec de bonnes illustrations sur les chiffonniers de Nanterre, ICI. 

Les industriels, métiers et professions en France – 1842 – Emile Gigault de la Bédollière – avec cent dessins d'Henri Monnier,  ICI.  

L'article Le Chiffonnier constitue le chapitre XXII, ICI .

La grande ville . Nouveau tableau de Paris   - 1842 , ouvrage collectif où Paul de Kock ((?) en fait, c'est dans l'article d'Eugène Briffault, Le marché des innocents, que j'ai trouvé le passage qui suit) associe le chiffonnier à la consommation d'alcool est ICI . Extrait: Toute la Halle, dès que les marchés commencent, est entourée d'un cercle lumineux; ce sont les boutiques de liquoristes largement ouvertes aux consommateurs; là viennent de tous les coins de la ville se réfugier le vagabondage et l'indigence, ce que M. Eugène Sue appellerait "la gouape"; les chiffonniers y sont en majorité, et parmi eux le nombre des femmes l'emporte sur celui des hommes; c'est la ronde de sabbat en haillons et toute souillée de boue; l'ivresse y fait horreur. C'est là que le malheur et la détresse boivent pour cinq centimes l'oubli de leurs mots, "la consolation", ainsi qu'ils le disent eux-mêmes. (…)

On ne trouve ailleurs dans cet ouvrage, qu'une seule fois le terme de chiffonnier(e), et c'est dans l'article d'Alexandre Dumas sur Les filles, où il signale, à propos d'une   statistique de 5081 prostituées reconverties, que 48 sont devenues chiffonnières.

La première version du Vin des chiffonniers (de Baudelaire) est de 1842-43 . Occasion de se souvenir que dans ses prestations sur France-Inter de l'été 2014, et même exactement le lundi 11 août, à 7h55 (mais si! On peut encore écouter le podcast : http://www.franceinter.fr/emission-un-ete-avec-baudelaire-le-vin-des-chiffonniers ), Antoine Compagnon avait commenté ce poème et qu'il avait conclu son billet ainsi : A sa façon, le poète est un chiffonnier. C'est le fond de mon étonnement et aussi de ma déception devant le contenu de ce cours 2016, où le chiffonnier littéraire, comme j'avais cru le prévoir , n'est en rien le littérateur. Je vois un peu dans cette phrase conclusive une promesse non tenue. Passons.

Mais en fait, c'est d'un autre ouvrage, cette fois, effectivement du seul Paul de Kock, édité en 1842, que parlait A.C. : La Grande Ville, nouveau tableau de Paris, comique, critique et philosophique. On y trouve un chapitre, Les débits de consolations, qui doit correspondre à sa référence. Je relève dans ce chapitre ce court passage: C'est aussi la nuit que se montrent les chiffonniers; ces industriels au petit croc entrent au débit de consolations se reposer des fatigues de la journée et se préparer à celles de la nuit.

Les petites industries en plein vent – Article de l'Illustration – 1844. Il y est assurément question de chiffonniers, même si l'article Les Chiffonniers de cette revue est de 1884.

Paul Niquet, mort en 1863. Date de naissance inconnue. Il tenait le plus fameux bouge de Paris, dit A.C., mis à la mode par les Mystères de Paris (1842-43) d'Eugène Sue.  De fait ( ICI la source) son échoppe était de longtemps réputée (depuis l'Empire) pour ses cerises à l'eau de vie. Il ne s'y vendait que très peu de vin, c'était surtout "le Casse-poitrine, la Jaune, la Blanche, le Fil-en-quatre, la Consolation, le Chien-tout-pur, l'Eau-d'aff, et le verre à un sou" 
Ce repaire, paradis des "ravageurs",  des malfaiteurs, des vagabonds, des mendiants, était le réceptacle de toute la pègre du quartier des Halles.

 

Paul Niquet

Privat d’Anglemont, donne dans "Les Oiseaux de Nuit" le récit suivant :   On pénétrait dans l’établissement par une allée étroite, longue et humide.
Son pavé était le même que celui de la rue, un grès de Fontainebleau, mais tellement piétiné par les nombreux clients, qu’il était plus boueux plus fatigué que les pavés de la rue Saint-Martin ou Saint-Denis.
Ceux des habitués qui avaient des hottes (les chiffonniers), les déposaient le long de ces murs avant de pénétrer dans la salle principale...
Cette salle était simplement un hangar sur lequel on avait posé un vitrage.  Elle était meublée de deux comptoirs en étain où se débitait cette eau-de-vie terrible qu’on appelait « le casse poitrine ».
Ces comptoirs lourds et massifs étaient chargés de brocs, de bouteilles et de fioles de touts formes. On voyait écrit sur certaines : « Parfait Amour », «La  liqueur des Braves », il y avait aussi « Les délices des Dames », un breuvage à faire prendre feu avec une allumette aux lèvres des consommatrices, et surtout « Le Petit Lait d’Henri IV » un effroyable mélange de cassis et de trois-six. Par un passage étroit, on arrivait à une petite salle derrière le comptoir ; c’était le salon de conversation, un lieu d’asile réservé uniquement aux initiés.  Trois longues tables et des bancs de bois en composaient le mobilier, les murs étaient blanchis à la chaux. L’architecture de ce bouge était bossue, tordue, renfrognée.
Dès la porte passée, on était saisi à la gorge par une odeur fade, chaude, nauséabonde, imprégné de miasmes humides qui soulevaient le cœur, c’était une puanteur qui est particulière à cette société immonde ...

Et voilà ce qu'en dit Nerval au chapitre XV des Nuits d'Octobre.

Le souper fait, nous allâmes prendre le café et le pousse-café à l'établissement célèbre de Paul Niquet. - Il y a là évidemment moins de millionnaires que chez Baratte... Les murs, très élevés et surmontés d'un vitrage, sont entièrement nus. Les pieds posent sur des dalles humides. Un comptoir immense partage en deux la salle, et sept ou huit chiffonnières, habituées de l'endroit, font tapisserie sur un banc opposé au comptoir. Le fond est occupé par une foule assez mêlée, où les disputes ne sont pas rares. Comme on ne peut pas à tout moment aller chercher la garde,  le vieux Niquet, si célèbre sous l'Empire par ses cerises à l'eau-de-vie, avait fait établir des conduits d'eau très utiles dans le cas d'une rixe violente.

On les lâche de plusieurs points de la salle sur les combattants, et, si cela ni les calme pas, on lève un certain appareil qui bouche hermétiquement l'issue. Alors, l'eau monte, et les plus furieux demandent grâce; c'est du moins ce qui se passait autrefois.

Mon compagnon m'avertit qu'il fallait payer une tournée aux chiffonnières pour se faire un parti dans l'établissement en cas de dispute. C'est, du reste, l'usage pour les gens mis en bourgeois. Ensuite vous pouvez vous livrer sans crainte aux charmes de la société. Vous avez conquis la faveur des dames.

Une des chiffonnières demanda de l'eau-de-vie.

- Tu sais bien que ça t'est défendu! répondit le garçon limonadier.

- Eh bien, alors, un petit verjus! mon amour de Polyte! Tu es si gentil avec tes beaux yeux noirs... Ah! si j'étais encore... ce que j'ai été!

Sa main tremblante laissa échapper le petit verre plein de grains de verjus à l'eau-de-vie, que l'on ramassa aussitôt;  les petits verres chez Paul Niquet sont épais comme des bouchons de carafe: ils rebondissent, et la liqueur seule est perdue.

- Un autre verjus! dit mon ami.

- Toi, t'es bien zentil aussi, mon p'tit fy, lui dit la chiffonnière; tu me happelle le p'tit Ba'as (Barras) qu'était si zentil, si zentil, avec ses cadenettes et son Zabot d'Angueleterre... Ah! c'était z'un homme aux oiseaux, mon p'tit fy, aux oiseaux!... vrai! z'un bel homme comme toi!

Après le second verjus, elle nous dit:

- Vous ne savez pas, mes enfants que l'ai été une des merveilleuses de ce temps-là... J'ai eu des bagues à mes doigts de pieds... Il y a des mirliflores et des généraux qui se sont battus pour moi!

- Tout ça, c'est la punition du bon Dieu! dit un voisin. Où est-ce qu'il est à présent, ton phaéton?

- Le bon Dieu! dit la chiffonnière exaspérée, le bon Dieu, c'est le diable!

Un homme maigre, en habit noir râpé, qui dormait sur un banc, se leva en trébuchant:

- Si le bon Dieu, c'est le diable, alors c'est le diable qui est le bon Dieu, cela revient toujours au même. Cette brave femme fait un affreux paralogisme, dit-il en se tournant vers nous...Comme ce peuple est ignorant! Ah! l'éducation, je m'y suis livré bien longtemps. Ma philosophie me console de tout ce que j'ai perdu.

- Et un petit verre! dit mon compagnon.

- J'accepte si' vous me permettez de définir la loi divine et la loi humaine...

La tête commençait à me tourner au milieu de ce public étrange; mon ami cependant, prenait plaisir à la conversation du philosophe, et redoublait les petits verres pour l'entendre raisonner et déraisonner plus longtemps.

Si tous ces détails n'étaient exacts, et si je ne cherchais ici à daguerréotyper la vérité, que de ressources romanesques me fourniraient ces deux types du malheur et de l'abrutissement! Les hommes riches manquent trop du courage qui consiste à pénétrer dans de semblables lieux, dans ce vestibule du purgatoire, d'où il serait peut-être facile de sauver quelques âmes... Un simple écrivain ne peut que mettre les doigts sur ces plaies, sans prétendre à les fermer.

Les prêtres eux-mêmes qui songent à sauver des âmes chinoises, indiennes ou tibétaines, n'accompliraient-ils pas dans de pareils lieux de dangereuses et sublimes missions?  Pourquoi le Seigneur vivait-il avec les païens et les publicains?

Le soleil commence à percer le vitrage supérieur de la salle, la porte s'éclaire. Je m'élance de cet enfer au moment d'une arrestation, et je respire avec bonheur le parfum de fleurs entassées sur le trottoir de la rue aux Fers.

La grande enceinte du marché présente deux longues rangées de femmes dont l'aube éclaire les visages pâles. Ce sont les revendeuses des divers marchés, auxquelles on a distribué des numéros, et qui attendent leur tour pour recevoir leurs denrées d'après la mercuriale fixée.

Pourquoi donc A.C., qui lit un passage de ce texte de Nerval (autour de Barras), tient-il à prononcer "mirliflorès" le mot "mirliflores", faisant sonner un accent grave, et soulignant le "s"? J'avais un oncle par alliance qui disait "le fusil", comme on dit "le-fu-zil".

A.C. renvoie à L'assommoir des chiffonniers, dans Le Tableau de Paris de Jules Vallès, où il est question d'une Aspasie de la casserole: L'Aspasie actuelle de la casserole, la madame Récamier de cette Abbaye aux loques s'appelle Eugénie-Joséphine-Euphrasie Mognonneux, baptisée à Saint-Eustache le jour du sacre de Charles X. Chaque date solennelle de notre histoire correspond à une évolution de sa vie; elle vend des fleurs jusqu'à la révolution de Juillet, ses charmes et sa jeunesse jusqu'au coup d'Etat, du poisson sous l'Empire, des guenilles depuis le siège.

A propos de Louis Huart, donné comme l'inventeur de la "petite physiologie" en tant que genre littéraire – A.C. cite sa Physiologie du flâneur, ouvrage illustré par des "vignettes de MM. Alophe, Daumier et Maurisset",  dont il extrait une sentence latine qui fleure bon la philosophie : Omnia mea mecum porto (Je transporte avec moi tous mes biens), attribuée par Cicéron à Bias de Priène (Priène = cité grecque d'Asie mineure), l'un de ces sept sages de la Grèce antique dont la liste a été plus ou moins fluctuante, fuyant sans rien emporter la ville prise par l'ennemi.

 

Deburau

On passe au mime Deburau (Jean Gaspard Baptiste) et à la pantomime Chand d'habits (ou Le Marrrchand d'habits ) qui a été reprise par Jean-Louis Barrault dans le film de Marcel Carné, Les enfants du Paradis. Il semble (sourceWikipédia) que cette pantomime ait été fortement articulée sur une critique de Théophile Gautier qui en aurait assuré la postérité beaucoup plus que son impact réel sur le public car Deburau ne l'aurait jouée "qu'avec réticence", qu'elle ne serait restée à l'affiche que le temps de sept représentations, et  qu'elle "n'aurait pas dû être considérée comme un moment important de sa carrière".

 

 

Musard

 

Musard_Chiffonniers_de_Paris

Et puis, on arrive à Musard, chef d'orchestre des bals de l'Opéra, le Napoléon du quadrille, etc.

Sa célébrité impressionne (voir ICI). A.C. narre le carnaval de Paris, la visite de Théophile Gautier au bal, un dessin de Gavarni et sa légende ... A propos de cette visite de Théophile Gautier, il projette un passage du compte- rendu de ce dernier sans en lire autre chose que les deux premières et les deux dernières lignes, mais tout le passage est intéressant, et plus distancié qu'il ne l'a souligné, même s'il l'a fait : Un torrent de pierrots et de débardeuses tourne autour d'un flot de masques stagnant au milieu de la salle, ébranlant le plancher comme une charge de cavalerie. Gare à ceux qui tombent.

Ce n'est donc qu'à ce prix qu'on s'amuse aujourd'hui; il faut, à force de gambades , de cabrioles, de dislocations extravagantes, de hochements de tête à se démonter le col, se procurer une espèce de congestion cérébrale; cette ivresse de mouvement ou délire gymnastique, a quelque chose d'étrange et de surnaturel. On croirait voir des malades attaqués de la chorée ou de la danse de Saint-Guy.

Nous avons assisté à Blidah et dans le Haouch de Ben Kaddour , aux soubresauts épileptiques des Aïssaouas, ces terribles convulsionnaires. Nous avons vu à Constantine la danse pour la conjuration des Djinns, mais tout cela est modéré en comparaison de la cachucha parisienne.

 De quels ennuis de pareils amusements font-ils le contre-poids? Comme nous rentrions chez nous, nous vîmes descendre d'un estaminet  une bande de quarante pierrots tous costumés de même, qui se rendaient au bal de l'Opéra, précédés d'une bannière où étaient écrits ces mots : Que la vie est amère !

Baudelaire, dit A.C., connaissait Musard, appréciait Musard et ne l'oubliera jamais. Il fait une citation d'un texte qui n'est pas directement de Baudelaire, mais à propos duquel il souligne combien celui-ci est familier du Carnaval et de ce bal Musard, texte pris dans Les causeries du Tintamarre, rédigé en collaboration avec Théodore de Banville et Auguste Vitu (qui fut tour à tour éditeur, historien politique et militaire, critique littéraire et de théâtre, romancier, auteur de manuels de finance, avant d'être enterré au Père Lachaise et de se voir dédier en 1912 une rue dans le XVième arrondissement de Paris): Le grand Musard vient de partir pour Berlin. Ce départ précipité a plongé dans la douleur les ballocheuses du quartier Bréda et gentilhommes à 29 sous qui descendent le fleuve de la vie sur l'asphalte du boulevard des Italiens. Rassurez-vous Mesdames, le grand Musard, l'Homère du quadrille, sera de retour le 15 Novembre. Sans Musard, point de Carnaval. Baudelaire avait dans ses cartons un projet de petit poème en prose consacré à Musard fils (Alfred Musard, fils de Philippe, qui avait pris la succession de son père).

Quittant Musard, A.C. se tourne vers la pièce de Félix Pyat, Le chiffonnier de Paris, créée le 11 Mai 1847 au théâtre de la Porte Saint-Martin, très grand succès dont il tient à nous détailler l'intrigue. Il lit les paroles de chansons intégrées à la comédie, tout cela me semble long et inexplicablement ennuyeux.  Il souligne le triomphe de Frédéric Lemaître  dans le rôle du Père Jean (le chiffonnier), disant que, d'après Louis-Henry Lecomte qui publie en 1888 un Frédérick-Lemaître : un comédien au XIXe siècle : étude biographique et critique d'après des documents inédits, Liard, le chiffonnier-philosophe, aurait donné au dit comédien une quinzaine de cours de chiffonnage pour crédibiliser son jeu. On tournicote autour de l'acte 1, scène 10, où le Père Jean renverse, rentré chez lui, sa hotte pour en faire l'inventaire. C'est une scène de triage, on en retrouve de ce type chez Hugo, dans Les Misérables; et Baudelaire parle, lui, de catalogage. Théophile Gautier s'est fendu d'un  très long et très élogieux article critique . Certains (Victor Hallays-Dabot, qui fut membre de la commission d'examen des ouvrages dramatiques au ministère des beaux-arts, censeur en somme) allant jusqu'à risquer que la pièce avait joué un rôle dans les idées révolutionnaires de 1848. Et A.C. redit l'épisode de la couronne, rajoutée au contenu de la hotte au lendemain de la chute de la royauté, qui a scandalisé Jules Janin. Impression pénible de discours sans fin…

Affirmation d'un topos de la couronne dans le tas d'ordure, avec léger cafouillage sur la modification de la pièce par Pyat lui-même pour sa reprise en 1880, et glissement vers une caricature de 1815 où Napoléon 1er  cherche sa couronne parmi des immondices, décoré du qualificatif de Père La Violette car il avait, affirmait-on, annoncé son retour de l'Île d'Elbe au moment de leur floraison …

Emballement d'une érudition qui donne un sentiment de n'importe quoi.

Napoléon traité de chiffonnier devançant, quelques décennies plus tard des chiffonniers qui se prendront pour Napoléon …

 

John Tenniel

John Tenniel, illustrateur en 1866 d'Alice au Pays des Merveilles, apparaît, caricaturant (ci-contre) Napoléon III en chiffonnier avec une légende articulée sur "pick up the pieces", car ce dernier avait - après la victoire de la Prusse sur l'Autriche à Sadowa dans le cadre d'un conflit où il avait voulu s'en tenir à une attitude de neutralité - parlé de ramasser les morceaux

Et voici que nous arrive Drumont énonçant  les extrêmes se touchent dans son Testament d'un antisémite (1891), pour insulter Arthur Meyer, directeur du Gaulois, qu'il traite de Chand'habits (marchand d'habits), c'est-à-dire de chiffonnier …

Puis revoilà Félix Pyat discourant sur le droit du travail en 1848, devenu député (montagnard), caricaturé par Cham, croqué par Daumier, se colletant dans les couloirs de l'assemblée avec Proudhon avant de le provoquer en duel, compromis dans l'émeute du 13 juin 1849 organisée contre la politique extérieure du gouvernement, exilé vingt ans à Londres, puis revenant finir sénateur Troisième République dans les Bouches du Rhône, ayant tiré de sa pièce un gros roman et finalement, mort sans savoir que son Père Jean allait connaître une carrière cinématographique et passer sur grand écran en 1913 (réalisateur: Emile Chautard) et en 1924 (réalisateur : Serge Nadejdine) .

On croyait en avoir fini avec Félix Pyat …  Quelle erreur! Il ressuscite pour la coda de la séance, dans un questionnement qui concerne sa connaissance de Baudelaire et qui affirme, citation d'une sienne préface à une réédition du susdit roman à l'appui, qu'il en reprend en tout cas les idées sur la modernité: "Une œuvre d'art se compose toujours de deux éléments distincts, l'un plus spécial au temps qui l'a produit, l'autre plus général et commun à tous les temps, l'un propre à l'humanité d'un âge, l'autre à celle de tous les âges. La proportion des deux constitue la différence du talent au génie, de l'éphémère à l'immortel."

 

hypnagogie

Fermez le ban. Comme dit Martine Aubry sur un thème un peu différent : Trop, c'est trop! C'est vrai, ça! Pourquoi faire simple, quand on peut faire compliqué? En même temps, je culpabilise.

C'est plutôt bien, tous ces renseignements, non? Mais c'est vrai, à l'écoute, j'atteins l'hypnagogie et l'overdose. Je dois pourtant reconnaître honnêtement que beaucoup, à la fin, ont encore la force d'applaudir. 

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Commentaires
C
fIni je ne vais plus cette annee attendre une heure et demie pour ce sujet effectivement soporifique..<br /> <br /> Quelle déception après une annee sans cours
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